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LA LUMIÈRE DES SUPERMARCHÉS

Nous savons ou comprenons que l’unité stimulus-réponse fonctionne – nos rapports vis-à-vis de la consommation nous en apportent la preuve. Ce que nous savons moins, c’est comment elle a infiltré un spectre très large d’expériences individuelles et comment (et Freud, pourrait-on dire, avait raison de partir, par la remémoration, à la recherche de ces liens refoulés) les représentations qui s’y attachent ont été associées à d’autres représentations, par des déplacements et des condensations défensives, de même que dans le conditionnement classique ou opérant. Mais Watson (fondateur du behaviorisme), sans rejeter la complexité des contenus reliés à l’unité stimulus-réponse, ne s’intéresse pas à l’introspection et il a peut-être lui aussi raison car, comme l’affirme Staddon:


“L'introspection ne jette qu'une lumière très faible sur les véritables causes du comportement. La vaste "matière noire" de l'inconscient demeure inaccessible à la pensée consciente tout en étant responsable des souvenirs, de la créativité, sans parler de ce "planificateur secret" dont les motivations cachées complémentent la motivation consciente” (Staddon, 2021, p. 14).


Si cette lumière est si faible, pourquoi se donner tant de peine, d’année de psychanalyse, pour l’atteindre? Vaste question qui rappelle un siècle de débats et de querelles entre psychanalystes et cognitivo-behavioristes. Dans tous les cas, si l’essentiel des cognitions (et des comportements qui en résultent) demeure inconscient et caché, pourquoi ne pas aller directement au but – comme le neuromarketing – et tenter d’atteindre ces mécanismes par des techniques cognitivo-comportementales? Pourquoi pas, mais nous sommes certainement des êtres aux caractéristiques biologiques, neurologiques, cognitives, comportementales et aussi... philosophiques. C’est-à-dire que, sans éliminer – comme l’a fait une certaine psychanalyse dogmatique en réduisant le tout au développement personnel singulier et indépendant d’autres approches du vivant – les particularités neuro-cognitivo-comportementales qui sont à l'origine de notre inconcscient économique, il nous semble important de rester vigilant sur les potentialités philosophiques de l’individu capable de se poser des questions réflexives (ignorées, en effet, par l’unité stimulus-réponse) telles: Qui suis-je? Quelles sont mes valeurs et mes désirs? Quelles sont les valeurs de la société? Puis-je accéder à la liberté? Comment rester humain? Comment rester autonome et libre vis-à-vis de la guerre économique dans laquelle nous sommes enrôlés de force? Et donc même si cette lumière est faible, comme une bougie à laquelle nous lisons un livre faute d'électricité, cette lumière nous rend humains – peut-être même plus humains qu'une lumière de supermarché – et demeure plus qu'essentielle dans notre existence afin d’éviter l’obscurantisme.


Poenaru, work in progress

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