Il existe un réseau croissant d’influences et de mécanismes qui ne cesse de réarchitecturer nos cerveaux, nos systèmes neuro-cognitivo-comportementaux ainsi que les écosystèmes qui en dépendent (politiques, sociaux, économiques, culturels). L’expression de ce réseau multimodal, bidirectionnel (sujet-objet) et co-construit, aux dimensions incalculables et démultipliées, s’effectue par une agglomération de facteurs: l'induction d'une addiction ordinaire et consensuelle; la culture de l’accumulation (sur le modèle capitaliste); la fabrication du consentement (Herman et Chomsky, 1988); le digital labor 24/7; l’exploitation des données naturelles et virtuelles; le traitement des données par l'intelligence artificielle qui a toujours plusieurs longueurs d'avance sur l'humain (devenu, à son insu et/ou avec son consentement, esclave impuissant et mine d'or exploitable à l'envi); la manipulation neuro-cognitivo-comportementale (neuromarkéting, nanomarkéting p. ex.); le conditionnement permanent par le reward (“récompenses”) et l'évaluation des performances; l’institutionnalisation de la reproduction sociale; les modifications perceptivo-mnésiques qui découlent de l’impératif de renouvellement constant des contenus internes et externes (sur le modèle de l’innovation/développement, de l’update qui déclasse une subjectivité assujettie au risque réel ou virtuel d’obsolescence); la création d’une mémoire (stockage) externe qui parasite le nécessaire refoulement pour l’organisation de la subjectivité; la peur de l’exclusion; la surveillance; le profilage personnel à des fins politico-économiques; la mise en danger de l’autonomie individuelle et l'exigence de passage à l’acte; la construction culturelle du post-humain; le parasitage du socle psychique individuel (son default mode, sa rêverie, sa fantasmatique qui consolident le psychisme tout en lui offrant des repères stables); la modification des repères spatio-temporels (les stimuli ne tiennent plus d’une présence située dans le temps et l’espace, avec une succession/simultanéité/localisation, mais d'une organisation désorganisée par l'ubiquité/virtualité); saturations cognitivo-comportementales, etc.
Nous pouvons donc, au vu de ce qui précède, parler de colonisation mentale pour décrire la capture croissante de la subjectivité et les modifications sans précédent qui découlent de cette agglomération de facteurs qui rendent la lecture du monde (voire du sujet, comme du sujet par le sujet lui-même au sens de réflexivité) quasi illisible. Nous devons nous rendre à l’évidence: cette accumulation de facteurs et de mécanismes dans l’espace interne et externe dépasse de loin les capacités individuelles. Les impératifs de la culture de l’accumulation (de biens, de connaissances, d’informations, d'images, de messages, de likes, etc.) nous ordonnent une accumulation forcée de "non-soi", induite par diverses stratégies car exploitable à des fin de profit, de manipulation et de contrôle socio-politique.
En d’autres mots, le réseau des possibles qui nous est imposé est si immense et invasif que le possible devient une abstraction voire une menace car il est corrélé à une permanente confrontation à... l'impossible. C'est cet impossible omniprésent, autoritaire et tout aussi invasif qui est une potentielle source de démantèlement subjectif et, par conséquent, de psychopathologie.
Poenaru, work in progress.
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